Dans l’Aisne, une exception journalistique Française et Européenne – UD 02
Le dernier hebdomadaire fabriqué au plomb est réalisé dans le département de l’Aisne, à Vervins, et qui plus est, dans les écuries d’une ancienne caserne de gendarmerie à proximité du tribunal désaffecté. Ainsi, il est possible de dire qu’ «il y a du plomb dans l’Aisne».
En Thiérache, le journal «le démocrate», avec son charme du papier imprimé à l’ancienne est notoirement connu puisque sa conception d’un autre temps a survécu à l’ère du numérique. Ses concepteurs axonais se sont toujours battus contre vents et marées pour conserver ce savoir-faire. Apolitique, comme son nom ne l’indique pas, le démocrate de l’Aisne met en lumière les activités et événements qui animent la Thiérache et publie les annonces légales officielles sur ses quatre pages d’un ancien format d’une laize de 88cm, vendu au prix de 0,65€ ou par un abonnement annuel de 30€. Pendant ses 116 ans d’existence, le journal n’a cessé de paraître qu’à trois reprises, lors des deux guerres mondiales et en 2020 pendant le premier confinement dû à la crise sanitaire de la Covid.
Il a été créé en 1906, sous le nom de «démocrate vervinois» par Pascal Ceccaldi, ancien sous-préfet, député et président du conseil général qui devait se faire connaître pour sa campagne électorale. A son décès de la grippe espagnole en novembre 1918, le journal est repris par son frère Antoine Ceccaldi, maire de Vervins et conseiller général. A l’abandon du journal par la famille Ceccaldi, c’est un élu local qui sollicite un journaliste axonais, Jacques Piraux, pour reprendre cette imprimerie atypique.
Le démocrate de l’Aisne devient association loi 1901 en 1988. Son actuelle existence n’est due qu’au dévouement sans limite pendant 33 ans de ce journaliste aujourd’hui octogénaire qui contribue toujours avec passion à sa rédaction, mais qui a laissé les rênes de l’association en septembre 2020 à Dominique Pierru, autodidacte en imprimerie, mais passionné de typographie.
La structure utilisée à la création a été en partie détruite en 1978, mais les écuries de l’ancienne brigade à cheval utilisées une trentaine d’années et fermées en 1892/1893 jouxtant les locaux du journal sont donc disponibles en 1920. Ils permettent d’y installer l’atelier d’impression où les machines sont encore en fonction aujourd’hui. Pénétrer dans ces lieux vous transporte dans un autre temps, pour ne pas dire au moyen âge.
Dans ces locaux chargés d’histoire, chaque semaine, une journaliste fournit les textes à un concepteur qui les frappe sur une imposante machine, appelée linotype, brevetée en 1885, qui marie machine à écrire et micro-fonderie permettant d’imprimer du texte sous forme de lignes de plomb. C’est une rotative Duplex de 1924 qui réalise l’impression et le pliage de l’hebdomadaire chaque jeudi pour une distribution dès le lendemain. En raison de l’ancienneté des appareils utilisés, il n’existe plus de pièces de rechange. En cas de panne, ce sont des artisans qui fabriquent, à la demande, les pièces défectueuses. Les lignes de plomb sont assemblées par le linotypiste dans des cadres métalliques pour monter les pages du journal.
La précaution essentielle à laquelle le manipulateur doit veiller, s’il ne veut pas recommencer, c’est de serrer les lignes de plomb pour éviter leur effondrement. Un vrai métier d’artiste, de titan et de patience, d’autant que pour taper une page il faut une journée et quatre heures pour la monter. Techniquement la réalisation prend donc beaucoup de temps, bien plus qu’avec les imprimantes d’aujourd’hui mais avec le charme d’antan pour fournir de 2.000 à 3.000 exemplaires par tirage.
Son classement aux monuments historiques vient d’être officialisé en 2022 et va pérenniser ce journal qui ne vît qu’avec les revenus des abonnements, des dons et des annonces légales.
Un autre projet est en cours ; c’est celui de la création d’un musée permettant aux visiteurs d’assister à la fabrication unique en son genre du journal. L’avenir nous dira si nous pourrons y retrouver la symbolique des lieux chargés d’une partie de l’histoire de la gendarmerie vervinoise.
Le président de l’UD 02 a bénéficié récemment d’une visite des locaux de ce journal grâce à la maison des entreprises de Thiérache et de la Serre (METS). Cette dernière s’investit pour le développement de la dynamique économique locale, pour la promotion et la valorisation du tissu industriel, artisanal et commercial en organisant cette opération “Savoir-Faire de Thiérache”. Le directeur du journal a accepté à cette occasion de faire paraître prochainement l’historique de l’UNPRG-UD 02 dans cet hebdomadaire mythique, unique en France et en Europe et a proposé l’organisation de nouvelles visites pour les adhérents de l’UD 02.
A suivre….
M. VAN LANCKER Patrice
Président UD 02
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