L’Art de Gouverner, entre : l’Intérêt Collectif, l’Esprit Partisan – L’Intelligence et le Savoir
Comme tout citoyen responsable, les membres de l’Union Nationale des Personnels et Retraités de la Gendarmerie, suivent avec attention l’évolution de la situation nationale et internationale. Ils s’inquiètent légitimement de leur avenir. Si le contexte géopolitique mondial demeure instable et souvent préoccupant, c’est bien la politique intérieure qui suscite aujourd’hui une inquiétude profonde.
Le 3 juin 1958, dans un moment de crise institutionnelle, l’Assemblée nationale adopte une loi autorisant la révision de la Constitution. Cette date marque le point de départ de la Cinquième République et de l’élaboration d’un nouveau texte fondamental, promulgué quelques mois plus tard.
Cette Constitution avait pour ambition de clarifier le fonctionnement des institutions, en définissant plus nettement la séparation des pouvoirs (exécutif, législatif et judiciaire) et en encadrant les relations entre l’État et les citoyens. Mais au-delà du texte, c’est la Cinquième République elle-même qui introduit une rupture majeure avec la tradition parlementaire française. Elle consacre un renforcement du pouvoir exécutif, au détriment parfois du rôle délibératif du Parlement.
Cette évolution, si elle a permis une certaine stabilité, interroge aujourd’hui. Dans un contexte de défiance croissante, de tensions sociales et de fragmentation politique, il est légitime de se demander si nos institutions permettent encore un dialogue serein entre les représentants du peuple et le gouvernement. Le respect des équilibres, la transparence des décisions, et la capacité à entendre les voix discordantes sont autant de conditions nécessaires à la vitalité démocratique.
Le respect, une vertu politique en péril
Alors, aujourd’hui, je pense que nous sommes en droit de nous poser une question essentielle : nos gouvernants, nos parlementaires, nos responsables politiques de tout bord ont-ils perdu la notion du respect ?
Ce respect, pourtant, est le fondement du débat démocratique. Il ne s’agit pas d’un simple geste de courtoisie, mais d’une posture républicaine. Respecter l’autre, c’est reconnaître sa légitimité à penser, à s’exprimer, à représenter. C’est accepter la contradiction sans sombrer dans l’invective. C’est débattre sans mépriser.
Lorsque le respect disparaît, le dialogue devient impossible. La politique se transforme en affrontement, en caricature, en rejet. On ne cherche plus à convaincre, mais à vaincre. On ne construit plus, on détruit.
Il est temps de rappeler que le respect n’est pas une faiblesse. C’est une force. Celle qui permet de bâtir ensemble, malgré les divergences. Celle qui fait vivre la République, dans sa pluralité, sa complexité, sa grandeur.
Revenir au fondamental du respect
La politique devrait être l’art de servir, de convaincre, de construire. Pourtant, elle devient trop souvent le théâtre d’un affrontement stérile, où les partis imposent des carcans idéologiques qui finissent par ressembler à de l’endoctrinement.
On ne débat plus, on condamne. On ne tend plus la main à l’élu d’un autre bord, pourtant légitimement choisi par le peuple, parce qu’il ne pense pas comme nous. On fait campagne contre un homme, contre une étiquette, et l’on oublie le programme que l’on prétend défendre. Le fond disparaît derrière la forme, l’idée derrière l’image.
Ce rejet de l’autre, cette crispation partisane, affaiblit notre démocratie. Elle empêche le dialogue, la nuance, la compréhension. Elle transforme l’électeur en militant aveugle, et l’élu en porte-voix d’un camp plutôt qu’en représentant du peuple.
Et si nous retrouvions le sens du respect ? Le respect de l’élu, quel que soit son bord. Le respect de l’électeur, quel que soit son choix. Le respect du débat, de la contradiction, de la complexité.
Ce respect ne signifie pas renoncer à ses convictions. Il signifie les porter avec dignité, les confronter avec intelligence, et reconnaître que l’autre, même opposé, peut nous aider à mieux comprendre ce qui est néfaste pour notre pays et ce qui peut le faire grandir.
Quand la technocratie étouffe l’humain
Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? Très certainement parce que la France est aujourd’hui gouvernée par une technocratie qui fait prévaloir les aspects techniques, procéduraux et normatifs au détriment de l’élément humain.
Les décisions se prennent dans des bureaux, loin du terrain, loin des réalités vécues par les citoyens. Les chiffres dominent les récits, les tableaux remplacent les témoignages, et les indicateurs deviennent plus importants que les visages.
Cette logique technocratique, si elle peut garantir une certaine rigueur, finit par dessécher le politique. Elle transforme les élus en gestionnaires, les débats en calculs, et les politiques publiques en équations abstraites. Elle oublie que gouverner, c’est aussi écouter, comprendre, ressentir.
La République ne peut se réduire à une mécanique institutionnelle. Elle est d’abord une aventure humaine, fondée sur le lien, la confiance, la parole donnée. Il est temps de remettre l’humain au cœur de la décision publique, de redonner sens à l’engagement, et de rappeler que la technique ne vaut que si elle sert une vision, une communauté, un destin partagé.
Intelligence, respect, connaissance : les fondements oubliés des gouvernements
Et si ce qui manque à notre pays pour former un gouvernement stable, digne et efficace, n’était pas tant une majorité parlementaire qu’une posture intellectuelle ? Une manière d’être, de penser, de débattre ?
L’intelligence, ce n’est pas l’arrogance du savoir. C’est la capacité à douter, à se remettre en cause, à chercher à comprendre ce que l’on croyait acquis. C’est ce qui distingue l’homme intelligent de l’homme simplement instruit. Le premier interroge, le second assène.
La connaissance, enfin, ne devrait pas être une arme idéologique, mais un outil de compréhension. Trop souvent, elle devient un prétexte à l’entre-soi, à l’exclusion de ceux qui pensent autrement. Or, gouverner, c’est aussi savoir expliquer, transmettre, convaincre.
Et si nous osions réclamer autre chose ? Non pas des slogans, mais des attitudes. Non pas des promesses, mais des preuves de respect, d’intelligence et de responsabilité. Un gouvernement ne devrait pas être une addition de forces politiques, mais une coalition de consciences. Des parlementaires qui ne seraient pas les porte-voix d’un camp, mais les serviteurs du peuple.
C’est cette exigence de maturité démocratique que nous devons retrouver. Pour que le gouvernement ne soit pas seulement une structure, mais une volonté partagée de faire grandir notre pays.
Daniel Gonfroy
Président National
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