LA GALONITE

Le syndicat des cadres de la sûreté intérieure (SCSI) honnit les officiers de gendarmerie mais revendique le port de galons de lieutenant colonel ou de colonel pour ses officiers de police occupant des postes à responsabilités. A la fin des années 1990, dans le cadre de sa réforme des corps et carrières, la police nationale a transformé son corps de commissaires qui relevait de la catégorie A en corps de catégorie A+. Parallèlement, elle a fusionné deux corps de catégorie B en un seul, celui des inspecteurs et celui des officiers de paix, pour en faire un corps d’officiers de police à trois grades (lieutenant, capitaine et commandant) portant un galonnage identique aux armées, mais toujours en dessous de celui des commissaires.

Dans les faits, avec environ 9000 officiers de police placés sous la direction de 1700 commissaires, les attributions des officiers sont celles d’un encadrement intermédiaire. En police judiciaire, un commandant de police encadre en général un groupe d’enquêteurs. En sécurité publique, un commandant échelon fonctionnel au sommet de sa carrière pourra diriger un petit commissariat dans une commune de 20 000 habitants (60 agents fonctionnant sur le régime des 3X8). Ces 2 fonctions type sont dévolues dans la gendarmerie à titre de comparaison à un major, lieutenant ou jeune capitaine (chef de groupe PJ ou commandant d’une communauté de brigades de taille comparable). Les officiers de police viennent d’obtenir une revalorisation de leur grille indiciaire amenant à terme un commandant fonctionnel divisionnaire (sa nouvelle appellation) en sommet de carrière à l’indice HEA 3 ( = colonel des armées 7 ans de grade). Tout en restant commandants, ces officiers prétendent désormais porter les galons dévolus aux lieutenants-colonels et colonels dans les armées, ce qui reviendrait à dire que placés au-dessus d’eux, les commissaires porteraient des galons de généraux dès leur sortie d’école. Une telle confusion est inacceptable pour les armées.

Comment accepter qu’un commandant de police aux responsabilités limitées porte les mêmes galons qu’un commandant de porte avions, sous-marin nucléaire, base aérienne ou groupement de gendarmerie ? En s’appropriant il y a 20 ans les 3 premiers grades militaires pour des fonctions de niveau incomparable, ils ont utilisé ce levier pour s’exhausser dans la fonction publique, conduisant d’ailleurs en grande partie au déclassement des grades correspondants dans les armées. LAlors que le premier ministre vient d’admettre après arbitrage que l’assimilation à la catégorie A+ pour les armées commencerait à partir des grades d’officier supérieur, les officiers subalternes étant assimilés à la catégorie A, accepter que des commandants de police portent des galons de lieutenant-colonel et colonel tout en restant dans la catégorie A conduira demain à ramener les officier supérieurs des armées dans la seule catégorie A. Cet impact sera désastreux pour les militaires au sein même du MINDEF vis à vis des corps civils (attachés et administrateurs civils notamment).

L’argument selon lequel les pompiers civils portent déjà des galons de lieutenant-colonel et colonel pour justifier ceux de la police n’est pas recevable. Les pompiers civils ont une hiérarchie reposant uniquement sur 5 grades de lieutenant à colonel que l’on franchit un à un. Un colonel de pompier est directeur d’un service départemental au même titre qu’un colonel commandant de groupement de gendarmerie. Sans être totalement identiques, les niveaux fonctionnels à même appellation restent comparables, ce qui ne peut être le cas pour la police. Si la police veut créer des grades de lieutenant colonel et colonel, au-dessus de ceux de commandant, il lui appartient de supprimer son corps de commissaires en le fusionnant avec celui des officiers, ce que veulent en fait les officiers de police mais en aucun cas les commissaires.

Le recrutement direct se fait à bac + 3 pour les officiers de police, à bac + 5 pour les commissaires tout comme les recrutements directs dans les corps militaires d’officiers. Ils ne peuvent donc admettre d’être déclassés. Croire que ce débat ne concernerait que les officiers serait réducteur : le déclassement des officiers des armées est de nature, par effet cascade induit, à déclasser tous les sous-officiers et militaires du rang au sein de la fonction publique. Le SCSI ne craint pas de voir se construire une hiérarchie d’opérette ! Il devrait savoir qu’on ne fait pas de champagne avec du mauvais vin.

Henri MARTINEZ
Président National de l’UNPRG


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